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Portraits européens

 

"Unis dans la diversité"

 

Ici, vous pourrez découvrir un visage, une histoire, un regard, un geste qui nous a touché. Ils sont hommes, femmes, enfants, mariés ou divorcés, blonds, bruns, roux, timides ou extravagants, et avant tout ils appartiennent à l'Europe. Ces personnes partagent une vision de l'Europe, portent un regard, à la fois particulier et universel sur ce qui les entoure. Ce qui les rassemble, c'est leur volonté de partage, et la bonté dont ils ont fait preuve pour partager un moment avec nous. Découvrez-les!

 

 

 

 

Sebastian, Kessel en devenir

 

Notre rencontre avec Sebastian est pur hasard. Ce n'est pas pour rien que dès le premier coup d'oeil, il me fit penser aux Enfants de la chance de Kessel  ["Les enfants de la chance s'appellent Ivan Vivant, Jacques Le Droz, Ramon de Jasarte, et Roberte Elven. Rien ne peut les séparer. Du Maroc à Montmartre, du Rio de Oro à la Cordillère des Andes, des terrains d'aviation aux salles de rédaction, des boîtes de nuit russes aux antichambres du gouvernement, ils dévorent la vie."].

Ce soir, c'était nous les chanceux, d'en rencontrer un. Perdus dans Utrecht [au sud d'Amsterdam], errant pour un bout de champ où planter la tente, nous avons miraculeusement atterri chez lui. Sebastian habite un endroit peu commun: avec neuf amis, il vit dans l'ancien hôpital d'Utrecht, soit près de 860 chambres avec ascenseur pour une centaine d'euros. Ses colocataires sont tous baroudeurs invétérés, artistes, cadres ou étudiants: un mélange improbable qui fait de ce lieu une sorte de miracle sorti de nulle part.

Crinière blonde, sourire immense et rire singulier: dès l'abord, on comprend qu'on rencontre un personnage. Après nous avoir offert les bières d'usage aux Pays-Bas, nous nous installons au salon, l'ancienne cuisine. Chacun se présente. On lui parle de notre voyage, odyssée ultime selon nous. Il écoute nos tribulations avec attention. D'ailleurs, le stop, il connaît: sur un coup de tête, il est parti au Danemark avec son pouce et des copains. Et puis en France, qu'il a ainsi traversée l'année dernière, bien qu'ils soient deux mecs. Déjà, il nous laisse coît. Pour manger, il est designer de fenêtres pour grands magasins. Il n'a que vingt-trois ans et a déjà réalisé des projets pour Mark et Spencer. Il avoue ça dans un éclat de rire. Il regrette de ne pas avoir fait d'études; mais il n'était pas fait pour ça. Il parle pourtant sans souci des problèmes de son pays: l'intolérance, la difficulté à trouver un travail. Mais il en est profondément amoureux de sa Hollande: aussi petite que sa patrie puisse paraître, vallées, mer, parcs naturels ne le lassent jamais. Il a élu domicile à Utrecht depuis plusieurs années, et cela lui semble le meilleur compromis, entre la trop touristique Amsterdam et la campagne. C'est avec son vélo qu'il parcourt les terres néerlandaises .

Mais sa passion, sa véritable passion, se trouve dans le garage, au milieu de l'immense parking de l'hôpital: la moto. Il les retape lui même et nous raconte comment il en est devenu mordu. Il nous raconte tout ça sans jamais se vanter, toujours comme si c'était tout naturel et simple. Pourtant, j'ai rarement pu rencontrer quelqu'un qui vivait son quotidien avec autant de ferveur et dont les jours ont déjà été si intenses. Un ami lui demande en 2011 ce qu'il fait la semaine suivante. Toujours prompt à se prêter à nimporte quelle aventure, il répond qu'il est sien. Il part alors pour un mois d'aventure en Europe jusqu'à Istanbul, avec une équipe de quatre cents motards. Une seule règle: ne pas revenir par les mêmes chemins. Il est ainsi passé dans les pays de l'Europe Orientale, et les Balkans, jusqu'en Albanie. Il connaît la Roumanie et l'Ukraine. Je tente timidiment de placer les anecdotes de mon voyage de l'année dernière. Son arrivée à Istanbul a néanmoins bien plus de panache: poser un pied en Asie à moto, ça a de la "gueule". Alors ils ont traversé le parc Gezi, pas encore tristement connu pour ses manifestations, sur leur bécane, pour rejoindre l'autre continent. Il évoque brièvement les galères, les chaînes cassées, les pneus crevés, le moteur exténué par la chaleur et les milliers de kilomètres sur des routes souvent peu praticables. Il nous conte ses histoires comme Kessel disait celle des premiers pilotes. C'est un moment plein de grâce, qui dure jusqu'au milieu de la nuit, quand commence à se faire ressentir la fatigue d'une journée où les up-and-downs ont été la règle.  

Le lendemain, c'est son anniversaire. Il nous avait promis une promenade en vélo dans le centre-ville et une après-midi de cuisine. Nous nous levons, persuadés que la courte nuit aura eu raison de sa parole. Il est pourtant bien debout, prêt à nous préparer un petit-déjeuner. Les vélos sont dans la cour. Il nous emmène dans la ville, dont il récite l'histoire et les murs sans aucune hésitation. Il fait beau. Décidément, certains jours ont ce goût si particulier de "la chance" qui manque à beaucoup d'autres. Nous le quittons pour assister à la performance chorégraphique d'une amie à Eindhoven. Jusqu'au bout, il nous aide dans le spot à choisir.

Chanceux encore, nous arrivons au spectacle à temps [près de 100 kilomètres en moins d'une heure et demie]. En rêvant à ce soir du 27 juin, où il compte fêter dignement son anniversaire dans son étrange maison où il nous a conviés.

                                                                                                                     

                                                                Caroline

 

 

Rencontre avec Phil, belge baba cool

 

Phil est ma première rencontre marquante du voyage. Lors de l’étape entre Paris et Amsterdam, il nous a pris, mon binôme et moi, près de la frontière entre la Belgique et la Hollande. Fin de la quarantaine, de longs cheveux blonds, un T-Shirt noir AC/DC et une voix trainante où pointe un accent belge. Après nous avoir demandé de le tutoyer,  il nous explique se rendre à Rotterdam afin d’acheter sa « weed » de la semaine. Mais attention Phil n’est pas un junkie, son premier joint il l’a pris à 33 ans afin d’atténuer les douleurs dues à son hémophilie. Il n’y a que ça qui marche selon lui. 

Très détendu sur à peu près tout, Phil nous parle de son identité belge. Il vient de Bruxelles et se considère ni comme wallon ni comme flamand, « il faut se calmer avec ses histoires d’opposition ». Il affirme que les différentes identitaires en Belgique sont comparables à des distinctions françaises entre « les Normands et les Bretons ». En bons sciencespistes, nous ne sommes pas vraiment convaincus, mais très intéressés par la discussion. 

Nous nous retrouvons coincés avec lui dans les embouteillages, l’occasion de discuter un peu plus. Phil s’occupe depuis longtemps d’un festival de métal féminin qui se déroule en France, dans le Nord. Mais depuis son divorce, il a décidé qu’il irait vivre en Floride avant ses 50 ans. C’est un vrai original qui partage son temps entre la France, la Belgique et la Hollande, et je me promets de lui consacrer un « portrait d’européen ». Avant de nous laisser à Rotterdam, il nous donne son mail, « si vous voulez visiter Bruxelles, on pourrait faire un tour, une fois ». 

 

Candice

 

Rencontre avec deux étudiants polonais 

 

 

               Ce jeudi 5 juin au matin, nous sortons la tête de nos tentes, installées en cercle sur une plaine près de la ville de Zakopane, en Pologne. A peine réveillés, Sacha, Clara, Hugo, William, Raphaëlle, et moi décidons de repartir de la ville pour atteindre la ville-frontière avec l’Ukraine le soir, Rzeszow. A la sortie de la ville, mon binôme Sacha et moi commençons à stopper sur le bord de la route. La journée devait s’annoncer longue. Nous devions stopper pendant plusieurs heures en direction de l’Ukraine. Cependant, une rencontre géniale nous fera rester à Cracovie toute l’après-midi.

 

Sacha et moi sommes pris rapidement à la sortie de Zakopane par un couple d’étudiants polonais, Maciej et Nadia. Le premier étudie dans une école d’ingénieurs à Cracovie tandis que la seconde étudie dans le domaine du commerce international. Ce couple s’était rejoint à Zakopane après que Maciej ait fait de l’escalade dans les montagnes du parc naturel des Tatras. Comme dans toutes voitures, nous commençons à faire la conversation. Cela aurait pu mal commencer : tandis que nous écoutons la radio, je demande à nos deux étudiants s’ils auraient, dans leur voiture, des CD de groupes de musique polonaise. Pas de chance, la musique que nous écoutions à la radio était déjà polonaise…

Ces deux étudiants incarnent cette Pologne nouvelle que nous avons découverte pendant le voyage. Il y aujourd’hui en Pologne une importante population jeune, dynamique, qui fait de longues études. Il y a encore un fort taux de chômage, mais la proportion d’emplois qualifiés a bondi en Pologne ces dernières décennies. Ces deux étudiants parlent également parfaitement l’anglais. Nous avons été surpris du nombre important de conducteurs polonais qui parlaient plusieurs langues comme l’anglais, l’allemand, le russe, le tchèque… Ces deux étudiants bénéficient de la croissance de la Pologne, peuvent aller dans des grandes villes comme Cracovie, afin de prolonger leurs études, et se loger dans des résidences étudiantes. Ils sont exceptionnellement ouverts d’esprit et ont conscience de l’importance d’une union commerciale et culturelle comme c’est le cas avec l’Union européenne. Bien qu’ils refusent que leur pays passe à l’euro et préfère conserver le Zloty, ils se réjouissent de leur liberté d’étudier, de voyager. Ils savent que les relations commerciales, notamment avec l’Allemagne, sont essentielles à la prospérité du pays. Toutefois, ils s’attristent du nombre de franchises qui pullulent et se multiplient dans les grandes villes : Macdonald’s, Subway, H&M, toutes les grandes multinationales sont présentes. Maciej et Nadia nous inviteront par ailleurs à déjeuner dans un petit restaurant que seuls les locaux connaissent : on y a dégusté des Pierogis, petits raviolis importés par les Mongols en Europe Centrale et de l’Est. Chaque pays y a ajouté une spécialité : en Pologne, les pierogis sont fourrés à la pomme de terre et au fromage, nous a expliqué Maciej. Maciej et Nadia restent fiers de leur culture et de l’histoire de leur pays. A la fin de l’après-midi, nous devons les quitter.

Peu de temps après notre rencontre, Maciej a envoyé un mail à l’association Stop&Go car j’avais laissé ma veste dans sa voiture. Nous nous sommes revus il y a seulement quelques jours, soit plus de deux semaines après la fin du voyage, pour passer une après-midi ensemble. J’ai pu le remercier pour m’avoir gardé ma veste. Surtout, nous avons échangé les rôles : alors que Maciej nous avait fait visiter la ville de Cracovie autrement, du point de vue d’un étudiant polonais qui constate les changements de modes de vie dans son pays, je lui fais visiter le sud de la France, la ville de Nice, près de là où je vis. 

Anaïs (Tartarin)

 

 

 

 

 

 

 

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